La
matière noire intergalactique
Les couples et
groupes de galaxies
Les observations
de la matière noire par la courbe de rotation ou l’agitation des étoiles concernent
le voisinage immédiat des galaxies. La masse et la taille des halos de matière
noire que l’on en déduit ne constituent que des valeurs minimales. Pour
déterminer ces paramètres plus précisément, il faut encore s’éloigner des
galaxies et étudier la gravité au-delà de leur voisinage immédiat.
Pour cela, on
peut par exemple observer un couple de galaxies en orbite l’une autour de
l’autre. Ce genre d’étude est très difficile car les mouvements relatifs ne
sont pas mesurables, à moins d’observer les galaxies sur des milliards
d’années, ce qui n’est pas spécialement pratique. Il faut pour cette raison
avoir recours à des arguments statistiques, ce qui rend les résultats moins
fiables. Des observations ont néanmoins été tentées et ont montré que la taille
et la masse d’un halo typique sont environ dix fois celles de la galaxie
visible.
Plutôt que des
couples, on peut également considérer des groupes de galaxies. Dans ce cas,
on mesure l’agitation des galaxies à l’intérieur du groupe, ce qui permet
d’estimer l’intensité de la gravité donc la masse du groupe. Ces calculs
donnent des résultats similaires à ceux obtenus à partir des couples. Ils
confirment qu’un halo typique possède un diamètre de l’ordre de 600.000
années-lumière, à comparer avec les 100.000 années-lumière de la partie visible
de notre Galaxie. Ils confirment également que les halos de matière noire
ont une masse à peu près dix fois plus grande que la partie visible.
Les amas de
galaxies
Après les
groupes, nous pouvons passer à des ensembles encore plus gigantesques, les amas de galaxies. C’est d’ailleurs
en étudiant des amas que l’astronome suisse Fritz Zwicky fut le premier, en
1933, à entrevoir le fait que la masse de l’Univers puisse être dominée par une
matière invisible. Comme dans le cas des groupes, on mesure la vitesse des
galaxies à l’intérieur de l’amas et on en déduit l’intensité de la gravité qui
stabilise l’ensemble, donc sa masse totale.
Ces observations
ont montré que la masse totale d’un amas est bien plus grande que la masse de
son contenu visible, mais également plus grande que la masse calculée en tenant
compte des halos de matière noire. En moyenne la masse totale d’un amas est
environ trois fois plus grande que la somme de la masse de ses constituants,
galaxies et halos inclus, donc à peu près trente fois plus grande que la masse
de ses constituants visibles.
On peut en
déduire que la matière noire a au moins deux composants : les halos
entourant les galaxies et un nuage diffus distribué dans tout
l’espace intergalactique à l’intérieur des amas. La matière visible ordinaire
ne représente plus que quelques pour cent du total.
Ces résultats ont
été confirmés par une autre méthode, s’appuyant sur l’effet de lentille gravitationnelleprovoqué par
certains amas. En effet, la déviation des rayons lumineux par cet effet dépend
de la masse de l’amas considéré, mais pas de la nature de cette masse.
L’analyse des images nous permet donc de mesurer la masse réelle de l’amas et
même sa distribution dans l’ensemble. Cette méthode a confirmé le facteur
trois entre la masse totale d’un amas et la somme de la masse de ses
constituants, galaxies et halos inclus.
La matière noire
à l’échelle cosmologique
L’existence de la
matière noire a été confirmée par le satellite WMAP en 2003 avec une autre
méthode, cette-fois ci à une échelle cosmologique. WMAP avait pour mission
de mesures les faibles variations de température du rayonnement fossile causées
par les fluctuations de densité de
l’Univers primordial. En comparant les données de WMAP aux prédictions de
différents modèles cosmologiques, les astrophysiciens peuvent déduire très
précisément la proportion de chaque type de matière ou d’énergie au contenu
total de l’Univers.
L’analyse des
résultats a montré que la matière ordinaire ne constitue que 4,6 pour cent du
contenu de l’Univers. Cette matière est aussi qualifié de baryonique, car ses
deux composants principaux, protons et neutrons, sont des membres de la
catégorie des baryons en physique des particules. Une matière noire non
baryonique, qualifiée d’exotique, représente 23 pour cent du contenu. Le reste,
73 pour cent, n’est pas composé de matière mais de ce que l’on a baptisé l’énergie noire.
L’étape suivante
dans l’étude de la matière invisible de l’Univers consiste à essayer de
comprendre la nature physique de la matière noire baryonique, invisible à
nos télescopes mais constituée de matière ordinaire, et de la matière noire exotique, dont la nature
est plus mystérieuse.
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