La
microlentille gravitationnelle
Plutôt que
d’étudier directement un type donné de candidat au titre de matière noire comme les naines rouges ou
brunes, il est également intéressant d’affiner notre connaissance de cette
masse cachée par d’éventuels effets indirects. Les années 1990 ont ainsi vu le
développement d’une technique destinée à détecter indirectement la matière
noire présente dans le halo de notre Galaxie.
Les lentilles
gravitationnelles
Cette méthode
repose sur le phénomène de lentille gravitationnelle. Celui-ci se
produit lorsque deux corps sont alignés sur la même ligne de visée. Comme le
montre la relativité
générale, le corps le plus proche peut alors dévier et concentrer les
rayons lumineux du corps plus lointain. Le résultat pour un observateur
terrestre est une forte et soudaine augmentation de la luminosité apparente du
corps le plus éloigné.
Ce phénomène peut
être utilisé pour détecter des objets sombres dans le halo de notre Galaxie.
En effet, ces objets ne sont pas fixes mais se déplacent lentement. Si par
hasard l’un d’entre eux passe exactement entre nous et une étoile plus
éloignée, l’intensité apparente de cette dernière augmentera fortement. Ainsi,
par exemple, si la lumière d’une étoile située dans l’un des Nuages de Magellan
voit son éclat apparent augmenter temporairement, il est possible que cela soit
dû au passage d’un objet sombre sur sa ligne de visée.
Évidemment, une
telle variation de luminosité peut aussi être causée par un phénomène
cataclysmique du typenova.
Il est cependant possible de différentier les deux situations en observant
l’amplification dans deux longueurs d’onde différentes. En effet, les
variations de luminosité dues à une lentille gravitationnelle sont
indépendantes de la longueur d’onde considérée, alors que les variations dues à
un changement au niveau de l’étoile en dépendent.
L’observation
d’un effet de lentille gravitationnelle ne fait pas que prouver l’existence
d’objets sombres dans le halo. La durée et l’amplitude du phénomène peuvent
nous apporter de nombreuses données comme la vitesse, la distance et la masse
du corps.
La principale
difficulté réside dans le fait que la probabilité du phénomène est extrêmement
faible. Pour avoir une chance raisonnable d’en détecter un, il faut donc
observer simultanément un très grand nombre d’étoiles situées hors du halo.
Ceci est heureusement possible dans la direction des Nuages de Magellan. Il est
également intéressant d’observer la région du bulbe
galactique, ce qui permet de détecter des corps sombres dans le disque
galactique plutôt que dans le halo.
Les programmes
d’observation
Les années 1990
virent la mise en route de plusieurs programmes de détection de lentilles
gravitationnelles dans la Galaxie. On peut citer en particulier l’expérience
EROS entre 1990 et 2003, la collaboration MACHO entre 1993 et
1999, suivie de SuperMACHO depuis 2001, le project OGLE qui continue depuis
1992 et la collaboration MOA depuis 1998.
Ces programmes
d’observation n’ont pas encore donné de valeurs moyennes très précises du fait
de la rareté des évènements de microlentille gravitationnelle. Ils excluent en
tout cas la matière noire baryonique comme l’explication principale de la
masse cachée. Ils semblent pour l’instant indiquer que les corps formés de
baryons ne représentent au maximum que 20 pour cent de la masse du halo
galactique.
La conclusion de
ces observations est que la matière noire baryonique ne
constitue qu’une faible fraction de la matière noire totale des
galaxies et de l’Univers, un résultat en accord avec les observations du satellite WMAP qui ont
montré que la matière baryonique (lumineuse ou noire) ne représente que 17 pour
cent de la matière totale présente dans l’Univers. Une autre explication est
donc nécessaire pour rendre compte de cette masse cachée : la matière noire exotique.
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