L’accélération
de l’expansion et l’énergie noire
L’expansion de
l’Univers accélère
L’année 1998 fut
l’une des plus importantes dates dans l’histoire de la cosmologie. Deux équipes
annoncèrent que l’expansion de l’Univers ne ralentissait pas comme on le
pensait jusqu’alors, mais était en fait en pleine accélération. Les deux
équipes étaient arrivées à cette conclusion de manière indépendante, en
s’appuyant sur l’observation de supernovae de type Ia.
Ce type de
supernova est depuis longtemps utilisé pour mesurer les distances dans
l’Univers. Les deux équipes observèrent les plus éloignées à l’époque, une
cinquantaine au total, principalement grâce à des télescopes terrestres. Ces
supernovae se révélèrent moins lumineuses et plus éloignées que ce que l’on
pouvait déduire de leur décalage
vers le rouge en s’appuyant sur l’hypothèse d’une expansion en train
de ralentir. Une analyse plus poussée des résultats montra que la seule
explication possible était une accélération de l’expansion.
Les résultats de
1998 furent confirmés quelques années plus tard par plusieurs observations
du télescope spatial. En 2001, celui-ci observa par exemple la supernova
la plus lointaine connue à l’époque. Là encore, la supernova se révéla légèrement
moins brillante que prévu, ce qui ne pouvait s’expliquer que par une expansion
accélérée. L’analyse de ce résultat montra que l’expansion de l’Univers était
freinée par la gravité pendant les premiers milliards d’années, mais commença à
accélérer à une époque située il y a entre 4 et 8 milliards d’années.
La supernova qui
confirma en 2001 que l’expansion de l’Univers accélère. L’image du haut montre
la région du ciel où la supernova fut détectée (cette image est connue sous le
nom de Northern Hubble Deep Field). L’image en bas à gauche est un
agrandissement où l’on aperçoit la galaxie elliptique qui contient la
supernova. L’image en bas à droite est le résultat d’un traitement numérique.
Il s’agit de la différence entre une image prise après l’explosion et une image
prise avant l’explosion. Les éléments qui n’ont pas changé entre les deux
époques disparaissent et l’augmentation de luminosité de la supernova
est clairement visible. Crédit : A.
Riess/STScI/NASA
L’énergie noire
L’accélération de
l’expansion a été interprétée comme la présence d’une force répulsive à grande
échelle capable de surmonter la force gravitationnelle qui lie les différents
constituants de l’Univers. La nature de cette force reste pour l’instant
mystérieuse et on lui a donné le nom d’énergie noire.
En 2003, les
observations du rayonnement fossile par
le satellite WMAP ont donné
une mesure très précise de la composition de l’Univers : 4,6 pour cent de
matière ordinaire, 23 pour cent de matière noire exotique et 73 pour
cent d’énergie noire.
La constante
cosmologique d’Einstein
L’une des
explications possibles de la force répulsive qui accélère l’expansion,
et qui semble privilégiée par les observations du satellite WMAP, fait
appel au concept de constante cosmologique.
Au début de ce
siècle, après avoir mis au point sa théorie de la relativité
générale, Albert Einstein l’appliqua à l’étude de l’Univers dans son
ensemble. A sa grande surprise, il réalisa que dans leur forme initiale les
équations de la nouvelle théorie ne permettaient pas à l’Univers d’être
statique et invariable dans le temps. Elles ne pouvaient s’accommoder que d’un
Univers en expansion ou en contraction. Or, la vision d’un Univers statique
était partagée par tous à cette époque.
Einstein, plutôt
que d’accepter le nouveau résultat, décida donc de modifier légèrement les
équations de la relativité générale en y introduisant un terme supplémentaire
appelé la constante cosmologique et noté Λ. Physiquement, ce terme
s’interprétait comme une nouvelle force qui tendait à faire se repousser les
corps les uns les autres. Einstein régla la constante de façon à ce que cette
force de répulsion contrebalance exactement la gravitation. Il obtenait
ainsi un Univers statique et invariable dans le temps. Bien sûr, une
dizaine d’années plus tard, les observations d’Edwin Hubble montrèrent
que l’Univers n’était pas statique mais en expansion et la constante
cosmologique perdit sa raison d’être.
La constante
cosmologique comme énergie noire
La constante
cosmologique fit un retour en force avec la découverte de l’accélération de
l’expansion. En effet, cette constante pourrait influencer
l’évolution de l’Univers et engendrer des comportements très divers selon sa
valeur. L’un des cas les plus intéressants est celui d’une constante
cosmologique légèrement supérieure à la valeur initialement utilisée par
Einstein. Dans ce cas, l’Univers serait né dans le Big
Bang et aurait suivi une expansion ralentie par la gravité, mais
l’effet de cette dernière aurait finalement été surmonté par une force de
répulsion à grande échelle et l’Univers serait entré dans une
phase d’expansion accélérée.
Ce cas de figure
correspond bien aux observations actuelles et le concept de constante
cosmologique est donc revenu sur le devant de la scène, même s’il n’apporte
guère de réponse quant à la nature physique de l’énergie noire. Les
observations de WMAP ont en particulier montré que l’énergie noire
s’apparentait plus à une constante cosmologique qu’à certaines autres
hypothèses avancées pour expliquer l’énergie noire.
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