La Mort
On connaît
beaucoup mieux le destin des comètes, du moins celles qui ne sont pas éjectées
du système solaire sous l'effet des perturbations planétaires. En effet il
existe plusieurs types de fins pour une comète :
- Si
la comète est composée d'un noyau de type météoritique entouré d'une
enveloppe de glaces se désagrégera progressivement au passage du Soleil jusqu'à
ce que toute la glace ait fondue. La comète ayant une telle fin se transforme
en astéroïde. On estime qu'une comète peut
perdre environ 0,5 % de sa masse à chaque passage en périhélie. Les comètes périodiques subissent ainsi une désagrégation progressive. Les poussières
qu'elles libèrent se dispersent peu à peu le long de leur orbite. Après
épuisement de leurs réserves de matériaux volatils, il est vraisemblable que
les noyaux cométaires continuent à graviter autour du Soleil comme des astéroïdes d'éclat
très faible, et donc très difficiles à détecter.
- Si
la comète ne contient pas ce noyau solide de type météoritique la glace
continuera à se sublimer jusqu'à qu'il ne reste plus de glace. Il ne reste
aucune trace de telles comètes car elles sont entièrement sublimées.
- La
lente évolution des comètes est parfois accélérée par la fragmentation de
leur noyau comme ce fut le cas pour la comète Shoemaker-Levy
9. Mais cette dernière n'à pas eu une fin identique a celles citées
ci-dessus; elle s'est écrasée sur Jupiter (ou plutôt "dans" Jupiter
car c'est une planète gazeuse). Le dernier type de fin pour une comète est donc
comme on peut le voir ci-dessous son écrasement contre un autre astre, le plus
souvent le Soleil, parfois une planète.
Entre le 16 et le 22
juillet 1994, la comète Shoemaker-Levy 9 se fragmente en 21 morceaux qui
percutent la planète Jupiter.
Les marques sombres que l'on peut voir sur ce montage montrant l'évolution des
taches sombres a la surface de Jupiter sont probablement dues à des matériaux
fins, condensés, des débris de la comète (ressemblant à de la suie) suspendus
dans l'atmosphère supérieure. Dans l'infrarouge, ils semblent lumineux en
raison des reflets de la lumière du Soleil mais elles sont en général plus foncées
que les nuages jupitériens.
L'Histoire de la comète "Shoemaker-Levy 9"
Tout commence à
l'observatoire de Palomar en janvier
1993, David Levy et ses collègues Caroline et Jean Shoemaker observent
le ciel a la recherche de comètes et d'astéroïdes. Lorsque Caroline pointe son
télescope vers une zone du système solaire situé a proximité de la planète
Jupiter elle observe un objet ressemblant à une comète déformée : elle croyait
y voir 5 ou 6 comètes avançant en ligne. Cette comète s'était brisée en
plusieurs morceaux, en raison des forces qu'exerçait Jupiter sur elle. Ils
baptisent cet étrange amas de comètes en chapelet Shoemaker-Levy 9. Il
s'agissait en fait d'une comète qui avait été morcelée, ce qui est rare mais
pas exceptionnel. Mais si la comète Shoemaker-Levy 9 fit sensation ce n'est pas
pour cela : ce qui rendit célèbre cette comète dans le monde de l'astronomie
est qu'elle allait entrer en collision avec Jupiter en juillet 1994.
On décida d'en
étudier plus précisément la trajectoire et on apprit que cette comète était en
orbite autour de Jupiter, ce qui est très inhabituel pour une comète car elles
sont en général en orbite autour du Soleil. Les observations plus approfondies
ont permis de déterminer le nombre de fragments : ils étaient 21 et on les
nomma chacun par une lettre de l'alphabet.
Cette photo de Shoemaker-Levy prise
avant la collision nous montre la disposition des différents fragments avant
l'impact avec Jupiter.
Tous les
télescopes et caméras du monde entier sont braqués sur la comète pour
immortaliser l’événement. C'était la première fois que l'on observait la
collision de deux astres dans notre système solaire. Cette collision avec
Jupiter est la plus formidable catastrophe sidérale jamais observée d'aussi
près.
Lors de la collision, Jupiter serait à environ 770 millions de kilomètres de la
Terre , ainsi il serait difficile de voir les effets depuis la Terre. En outre,
les fragments de comète n'affecteront pas Jupiter dans son ensemble. On peut
comparer cette collision à 21 aiguilles que l'on planterait dans une pomme, les
effets ne seront que superficiels et très localisés, l'ensemble ne sera pas
vraiment modifié.
D'après les calculs effectués avant la collision, les fragments devaient
disparaître 5 a 15 secondes avant l'impact, les rendant inobservables depuis la
Terre. Les derniers fragments entant en collision avec Jupiter seront les plus
observables car disparaîtront moins longtemps avant l'impact. Le fragment W
disparaîtra seulement 5 secondes avant impact. En outre, l'explosion devait
être visible depuis la Terre si les débris montaient à seulement quelques 100
Km de hauteur.
Or, les simulations pour des fragments de 2 à 4 kilomètres indiquaient que le
nuage de débris résultant de l'impact s'élèverait à des centaines de kilomètres
au-dessus des nuages jupitériens, et refléterait la lumière du Soleil dans les
minutes suivant l'impact. L'étude de ce nuage permettrait d'obtenir des données
concernant la taille du fragment et il était possible que s'il était assez
grand et lumineux, il pourrait être observé par les amateurs.
Les prévisions suivantes sont basées sur des simulations pour des fragments de
1 kilomètre: chaque fragment de comète traversera l'atmosphère du Jupiter à une
vitesse de 60 Km/s. À une altitude de 100 kilomètres au-dessus des nuages, les
forces aérodynamiques morcelleront le fragment. Cinq secondes après son entrée
dans l'atmosphère, le fragment de comète aura une énergie cinétique équivalente
à environ 200.000 mégatonnes de TNT et disparaîtra à 100- 150 Km au-dessous de
la couche de nuage. De plus grands fragments auront plus d'énergie et
disparaîtraient plus profondément.
Le gaz chauffé à 30.000 K résultant de l'impact d'une comète d'un Km éclatera,
formant une boule de feu semblable à une explosion nucléaire, mais en beaucoup
plus grand. La boule de feu continuera à monter, atteignant une taille de
peut-être 1.000 kilomètres avant de retomber, et s'étendra au-dessus de la
stratosphère à un rayon de 2.000 à 3.000 Km du point d'impact. La boule de feu
sera quelque peu rouge, avec une température caractéristique de 2000 à 4000 K.
Pratiquement tout le matériel cométaire s'élèvera derrière l'onde de choc à une
altitude de 300 Km au-dessus des nuages mais ne sera pas directement
observable.
Pendant ce temps, l'onde de choc se déplaçant de bas en haut chauffera les
nuages locaux, les faisant s'élever dans la stratosphère. Ceci permettra à des
spectrophotomètres d'essayer de les étudier directement, une occasion unique de
confirmer des théories sur la composition des nuages jupitériens. En outre, le
choc pourrait provoquer des vagues séismiques (semblables à ceux des
tremblements de terre terrestres) qui pourraient être détectés dans une grande
partie de la planète par les télescopes infrarouges durant la première et
deuxième heure après chaque impact.
Les queues émanant des plus gros fragments affecteront également Jupiter. En
effet, l'injection de la poussière dans le système jupitérien peut avoir
plusieurs conséquences. D'abord, la poussière absorbera plusieurs des
particules qui produisent actuellement les émissions radio dans la magnétosphère
jupitérienne. En second lieu, la poussière peut former un deuxième anneau fin
autour de la planète.
Juste avant que
le premier fragment de comète ait frappé Jupiter, on constata, d'après les
observations du télescope spatial "Hubble", que les fragments avaient
des diamètres généralement compris entre 1 et 2 Km . La majorité des fragments
se sont désintégrés en grande partie avant leur impact et n'ont laissé que peu
de traces sur la surface de Jupiter mais certains ont formé de grandes boules
de feu qui se sont élevés au-dessus de la surface de Jupiter et ont laissé des
marques foncées géantes sur la planète. A peine les images de l'impact du
fragment A étaient-elles retransmises par Hubble que des milliers d'amateurs
téléchargeaient les images et les coordonnées de l'impact.
Le fragment qui a laissé la plus grande marque est le fragment G qui a heurté
Jupiter avec une énergie estimée à l'équivalent de 6.000.000 mégatonnes de TNT
(environ 600 fois l'arsenal estimé du monde). Le boules de feu du fragment G se
sont élevées à environ 3.000 Km au-dessus des nuages jupitériens et ont été
observées par beaucoup d'observatoires (la plupart du temps dans l'infrarouge)
et de nombreux amateurs, même avec de petits télescopes, ont affirmé avoir vu
les marques sombres de l'impact.
Les observateurs
ont détecté certaines des collisions à l'aide des radiotélescopes mais n'ont
pas observé la lumière émise pendant l'entrée des fragments dans l'atmosphère
jupitérienne par réflexion des lunes de Jupiter comme il était prévu. Les
images du vaisseau spatial Galilée de l'impact W ont montré un éclair lumineux
qui a duré quelques secondes mais il n'était pas très intense et n'aurait
certainement pas pu être observé depuis la Terre.
Plusieurs des impacts ultérieurs ont frappé près des emplacements des impacts
précédents et les traces résultantes sont bientôt devenues très complexes. Le
développement de ces nouvelles traces sur Jupiter a été suivi par beaucoup
d'observateurs. Les marques les plus petites ont disparu rapidement mais les
marques les plus importantes se sont étirées, les matériaux les composants
s'étant fondus dans la circulation générale avant de disparaître, en se
dissolvant dans les nuages jupitériens suite à leur refroidissement. La marque
résultant de l'impact G a même formé un anneau, le second plus visible de la
planète qui n'a disparu que au courant de l'année 1995.
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